Le monde féminin dans la société grecque antique : éducation, travail, responsabilités et soins du corps des femmes grecques.

Introduction

Dans la société grecque antique le monde des hommes et celui des femmes sont bien distincts.

Les domaines et espaces propres au monde féminin sont l’intérieur de la maison et la vie domestique. Les femmes ont toutefois la possibilité d’investir des espaces à l’extérieur de la maison qui leur sont autorisés, notamment les lieux des fêtes religieuses dans lesquelles elles jouent un rôle considérable.

L’éducation des femmes grecques

Les femmes grecques vivent entre elles dans une partie de la maison qui leur est réservée, le gynécée.

Les femmes des classes aisées sont éduquées pour accomplir leur principal rôle civique, la maternité. Elles ont la charge de donner naissance à des enfants de façon à garantir la reproduction du « corps des citoyens », c’est-à-dire de la population de la cité. Un parallèle est souvent établi entre accouchement et guerre : la femme morte en couches est comparée au soldat mort sur le champ de bataille.

Les qualités exigées chez une femme sont la soumission, la fidélité, la réserve et la discrétion, l’amour pour l’époux et pour les enfants. Ces qualités composent la  « sagesse » ; sophrosuné en grec. Le modèle de l’épouse et mère idéale est sans doute Pénélope, la femme d’Ulysse, qui l’attendra pendant vingt ans, en lui restant fidèle et en résistant à l’insistance de ses prétendants.

Les femmes grecques des milieux aristocratiques peuvent recevoir une instruction au moins en partie semblable à celle des garçons, mais avec des finalités différentes. Elles peuvent apprendre à lire, à écrire et à compter mais dans le but de gérer les affaires de la maison en encadrant, par exemple, les esclaves et les serviteurs. L’ouvrage l’Économique, écrit par Xénophon au IVe s. avant J.-C., met en exergue le rôle central de la femme dans la gestion et l’entretien de la maison. Nous pouvons d’ailleurs ici souligner que quasiment tout ce que nous savons de la vie des femmes a été relaté par des hommes.

En revanche, elles ne sont pas formées à la rhétorique (l’art de bien parler), puisque elles ne seront jamais amenées à s’exprimer en public, à participer aux débats politiques ou judiciaires. Quelques femmes ont toutefois marqué l’histoire après avoir appris, pratiqué et parfois même enseigné l’art oratoire. Aspasie, par exemple, une courtisane originaire de la ville de Milet en Asie Mineure (l’actuelle Turquie) deviendra la compagne de Périclès, le chef politique et militaire d’Athènes durant le Ve s. avant. J.-C.

Les femmes apprennent également le chant, la danse et la musique, disciplines qui pourront leur servir lors de leur participation aux cérémonies religieuses. C’est d’ailleurs par ce biais que les femmes prennent part à la vie publique de la cité.

Au Ve s. avant. J.-C., il existe un centre d’éducation réservé aux femmes dans la ville de Mytilène, sur l’île de Lesbos dont est originaire la poétesse Sappho. D’autres noms de poétesses nous sont parvenus : Praxilla, Moirô de Bysance, Anyté (l’équivalent féminin d’Homère), Erinna, Telesilla, Corinne, Nossis, Myrtis. Ces femmes sont qualifiées d’« amies » ou « servantes des Muses ».

À partir de l’époque hellénistique (IVe s. avant J.-C.), l’instruction progresse parmi les femmes. D’ailleurs, les représentations de femmes sur les vases grecs à figures rouges  témoignent de cette évolution : elles sont plus souvent représentées avec un rouleau de papyrus à la main, symbole de l’instruction auparavant réservée aux garçons. La sophia, la sagesse que les livres confèrent, peut désormais être associée aussi à des femmes. Nous avons connaissance de femmes médecins, historiennes, philosophes et linguistes.

  • Amphore représentant Hélène entourée d'Achille et d'Hector - Photo Mairie de Bordeaux, Musée d'Aquitaine, photo L. Gauthier
    Amphore représentant Hélène entourée d’Achille et d’Hector – Photo Mairie de Bordeaux, Musée d’Aquitaine, photo L. Gauthier

Travail, devoirs, responsabilités des femmes grecques

Quelles sont les activités que les femmes exercent dans ce gynécée ?

Leur activité principale consiste à travailler la laine. Pénélope, épouse d’Ulysse, que nous avons évoquée précédemment comme modèle de la femme idéale, incarne aussi un autre archétype, celui de la philergia, c’est-à-dire l’amour pour le travail et pour le travail de laine en particulier. Pour complimenter une femme, on dit qu’elle est une habile fileuse et tisseuse. Dès l’époque d’Homère, au VIIIe s. avant J.-C., l’attribut typique de la femme est la quenouille. Sur les vases grecs, sur les stèles funéraires, les femmes sont souvent représentées en train de filer, assises, immobiles : la passivité est ainsi considérée comme une qualité.

Dans le gynécée, la vie des femmes s’organise donc autour du métier à tisser et non pas de la cuisine. Elles se rassemblent et éduquent les enfants, y compris les garçons qui vivent avec elles jusqu’à l’âge de sept ans. On raconte les mythes, on apprend des chansons, on transmet les recettes….

Les autres activités qui leur sont confiées sont également liées aux soins de la famille. Elles prennent soin des jeunes enfants, mais aussi des esclaves malades. Elles s’occupent de la nourriture, d’aller chercher l’eau. Ce sont aussi elles qui préparent le corps des défunts avant la procession funéraire.

Les femmes ne sont toutefois pas cloitrées dans le gynécée : les comédies d’Aristophane et les tragédies d’Euripide les décrivent sortant pour se rencontrer, se réunissant pour commenter, par exemple, les événements qui surviennent dans la cité ou pour protester contre des décisions imposées par les hommes.

La mythologie fournie aussi des images de femmes qui ne s’inscrivent pas dans ce modèle classique. Les Ménades, par exemple, ces femmes du cortège de Dionysos qui abandonnent leur foyer et leurs enfants et donc leurs devoirs. Ce faisant, elles compromettent le futur de la cité. Les Amazones, Clytemnestre ou Médée représentent également des contre-modèles qui n’adoptent pas le comportement que l’on attend d’une femme.

 

  • Fuseau et fusaïole - Musée de la Romanité Nîmes
    Fuseau et fusaïole – Musée de la Romanité Nîmes
  • Reproduction moderne de métier à tisser antique - Musée de la Romanité Nîmes
    Reproduction moderne de métier à tisser antique – Musée de la Romanité Nîmes
  • Quenouille - Musée de la Romanité Nîmes
    Quenouille – Musée de la Romanité Nîmes

Soins du corps chez les femmes grecques

Dès l’époque d’Homère, au VIIIe s. avant J.-C., une des « qualités » exigées d’une femme est la beauté. Le poète cite souvent la beauté d’une femme qui la rend « proche d’une déesse ». Et cette beauté peut amener à tout « pardonner ». C’est le sens du discours des vieux Troyens qui observent les combats du haut des remparts de Troie : selon eux, ce n’est pas une honte que Troyens et Grecs souffrent et meurent puisqu’ils le font pour la beauté d’Hélène, la plus belle femme au monde.

L’une des activités féminines pratiquées dans le gynécée, le lieu réservé aux femmes, consistait donc à prendre soin de soi. Pour conserver et parfaire leur beauté, les femmes doivent soigner leur apparence et leur tenue. Pour les femmes mariées, se préoccuper de sa beauté est une injonction dictée par le désir et/ou le besoin de plaire à son époux. Elles doivent en effet faire face à des concurrentes comme les concubines ou les courtisanes que leurs époux côtoient lors des banquets et des symposia (moment conviviale qui suit le banquet pendant lequel on « boit ensemble » du vin), d’où les épouses sont exclues.

Or la cosmétique (du verbe grec kosméo), qui est l’art de « mettre en ordre, de rendre présentable », les aide dans cette quête.

Les vases grecs figurés permettent d’imaginer ces scènes de la vie quotidienne : la maîtresse de maison est assise sur un fauteuil avec son miroir à la main, entourée de ses servantes. Le miroir est sans doute l’objet féminin le plus emblématique. Tout autour, sont représentés les ustensiles nécessaires aux soins : les fioles contenant les huiles parfumées (aryballes, alabastres, lécythes …), les boîtes à bijoux et celles qui contiennent les poudres de maquillage, les cruches et bassins pour la toilette…

Des ouvrages antiques sur la fabrication d’onguents et la phytothérapie existent. La ville de Corinthe, par exemple, est connue pour la production de parfums et de leurs « flacons » (aryballes, lécythes, etc.) qui sont exportés dans toute la Méditerranée entre le VIIIe et le VIe siècle avant J.-C.

  • Tête de Vénus - Musée de la Romanité Nîmes
    Tête de Vénus – Musée de la Romanité Nîmes
  • Epingles à cheveux - Musée de la Romanité Nîmes
    Epingles à cheveux – Musée de la Romanité Nîmes
  • Pyxide corinthienne (boîte à bijoux) - Musée de la Romanité Nîmes
    Pyxide corinthienne (boîte à bijoux) – Musée de la Romanité Nîmes
  • Aryballe piriforme corinthien (vase à parfum) - Musée de la Romanité Nîmes
    Aryballe piriforme corinthien (vase à parfum) – Musée de la Romanité Nîmes
  • Aryballe globulaire corinthien (vase à parfum) - Musée de la Romanité Nîmes
    Aryballe globulaire corinthien (vase à parfum) – Musée de la Romanité Nîmes
  • Miroir étrusque représentant deux femmes et deux hommes - Musée de la Romanité Nîmes
    Miroir étrusque représentant deux femmes et deux hommes – Musée de la Romanité Nîmes

En conclusion

Les femmes occupent une place bien définie dans la société grecque en tant qu’épouses et mères. Toutefois, selon les classes sociales, les lieux et les périodes historiques, certaines ont pu investir d’autres domaines culturels, religieux et professionnels.

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